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Eléments de conversation pour briller en société
4 juin 2023

galanterie, séduction EPISODE 2 La galanterie dans l’Histoire

 

C

Séduction et galanterie en période hostile : de l’intime au totalitaire

 

EPISODE 2       La galanterie dans l’Histoire

Michelle Perrot qui a dirigé l’Histoire des femmes sait pertinemment que la galanterie  s’est manifestée en France au cours des siècles classiques. Mais le poids de l’idéologie est tel aujourd’hui qu’il ne doit pas être bon de le rappeler.

 

En toile de fond :  la brutalité et le viol

 On ne peut apprécier le développement des relations entre hommes et femmes aux XVII-XVIIIème siècles, qui touche essentiellement les classes privilégiées, sans parler de la réalité quotidienne vécue par les femmes sans défense – c’est-à-dire sans famille puissante, aristocratique de préférence. La femme seule, célibataire, veuve, la servante, la femme du peuple même mariée  est une proie habituelle pour tous les prédateurs.  En voici quelques exemples.

Samuel Pepys nous a laissé un Journal de sa vie à  Londres au XVIIème s. Il avoue ne pouvoir s’empêcher de glisser sa main dans un corsage ou sous la jupe d’une cabaretière ou d’une femme de chambre.  Bien peu de femmes protestent devant des gestes qui devaient faire partie de leur quotidien   <Histoire de la vie privée, tome 4, chap. 3.

Georges Vigarello ouvre son livre  Le Viol, XVIè-XXè s. par une anecdote. A la fin du XVIIIè s., Jean-Louis Ménétra, vitrier consigne dans son Journal un moment, qu’il juge plaisant, d’une promenade avec un ami en 1760. 

Dans le bois de Vincennes, ils découvrent un couple « en train de bien faire » écrit Ménétra. Ils se moquent des amants puis jugent « insolents » les propos du jeune homme, se saisissent de son épée et  l’un après l’autre violent la jeune femme « à qui nous ne donnâmes point le temps de se remettre ». Cet épisode offert à la lecture, sans doute avec une satisfaction certaine, sans le moindre soupçon de culpabilité. 

Aucune plainte n’a été déposée par la jeune femme. A quoi bon ? Le viol est considéré comme une sexualité de compensation pour des jeunes gens qui n’ont pas les moyens de se marier. 

Dans la hiérarchie des craintes populaires, le vol des biens tient le premier rang jusqu’au milieu du XIXème s. Le viol est ainsi une violence comme une autre, qui n’entraîne pas nécessairement la mort. 

Une violence presque négligeable, d’autant plus que la femme-qui-se-prétend-violée est généralement considérée comme consentante. C’est d’ailleurs ce que dit son amant qu’elle a l’audace d’accuser.

Sur ce point, Rousseau est clair : « la nature a pourvu le plus faible d’autant de force qu’il en faut pour résister quand il lui plaît » (Emile, livre V, p. 468 éd Garnier-Flammarion).« C’est, ajoute-t-il, la « ruse » féminine qui la pousse à se refuser pour mieux s’abandonner ensuite et donner à l’homme le sentiment bien viril d’avoir emporté la victoire. 

Le droit condamne la violence, mais les juges comprennent, sans la justifier, cette violence quotidienne qui naît à tout propos. Ils sont accablés par « le grand nombre de coupables qu’il faudrait punir » (Traité de la justice criminelle, 1752). 

Telle est la situation qui règne depuis des siècles.  Pour plus d’informations, lire Histoire du viol, XVI-XXème s. de Georges Vigarello ou consulter « Le viol, entre la coutume et la loi » sur le site  http://midsky.canalblog.com/archives/2020/05/24/38318271.html

 

Un état d’esprit très machiste

 Rappelons tout d’abord un certain état d’esprit qui traverse le XVIIème s. siècle. Les guerres civiles se terminent avec l’Édit de Nantes et l’avènement d’Henri IV. Mais le roi, comme les Gascons qui l’accompagnent, ont des manières un peu rudes.  Les spectacles sont forts en goût : dans un ballet, un ramoneur, joué par un gentilhomme, chante : 

« Recevez-moi chez vous, / J’y trouverai peut-être/ Quelques trous à boucher. » Et la Cour rit, comme le roi, la reine et le petit prince… 

Tallemant des Réaux rapporte cette anecdote : le duc de Candale ayant trouvé un jour un de ses soldats « couché avec une garce dans la Place Royale », lui proposa un écu d’or s’il voulait « la baiser le lendemain, en plein midi ». 

Ce qui fut fait. Candale et ses amis prirent soin de faire grand bruit et « toutes les dames mirent la tête à la fenêtre et virent ce beau spectacle ». 

C’est dire qu’une grande liberté de mœurs régnait pour la joie de tous, sauf des femmes violentées.

 

Malgré tout, une évolution lente commence

C’est à Paris, au cours du XVIIè s, que les règles vont peu à peu changer dans les salons souvent tenus par des épouses à qui certains maris laissaient cette liberté, ou par de riches veuves qui ne devaient rendre compte à personne. Les hommes plus intéressés par les activités de prédation -chasse, guerre, copulation rapide-  n’avaient aucune considération pour les plaisirs de l’esprit, qu’ils laissaient donc au sexe faible.

Mme de Rambouillet créa le premier salon dans son hôtel en 1608 et  réunit autour d’elle un certain nombre de romanciers, poètes, dramaturges.  On y parlait littérature, on faisait des vers, on analysait les sentiments amoureux avec obstination,  on surveillait son langage et son attitude, par réaction envers les usages de l’époque précédente.

Les salons devinrent à la mode et profitèrent de l’éclipse de la cour de Louis XIII, roi falot qui n’éprouvait pas de goût pour les femmes. 

Ainsi, dans cette ambiance nouvelle, à  l’automne 1636, trois jeunes soldats, les frères Arnauld, connus pour leurs débordements pénètrent dans Paris. Ils participent au siège de Corbie et ont  obtenu une permission de trois jours. Sans doute ont-ils passé un temps dans un des nombreux bordels de la capitale. Mais ils ne s’y attardent pas et se rendent dans le salon de l’Hôtel de Rambouillet. Les dames leur demandent de jouer dans la tragédie de Mairet, Sophonisbe. Ils reviendront, chacun  ayant appris son rôle par cœur, alors que ces dames jouent en lisant le livre à la main ! Ils partiront dans la nuit rejoindre le champ de bataille.      <  Claude Dulong 

Bref, dans un milieu limité et privilégié, les relations changeaient, insensiblement.

 

Point nodal : les plaisirs de la mixité

 Pour le dire vite (mais pourquoi s’interdirait-on d’être aussi brutes que les contempteurs de la galanterie française ?), hommes et femmes vivent ensemble. 

A Joan Scott qui affirmait dans Libération, le 26 janvier 2018  : « La séduction comme trait d’identité national français est un mythe », Huet répondait quatre siècles plus tôt, dans son Traité de l’origine des romans, 1670 : «  La politesse de notre galanterie vient, à mon avis, de la grande liberté dans laquelle les hommes vivent avec les femmes. Elles sont presque recluses en Italie et en Espagne et sont séparées par tant d’obstacles qu’on ne leur parle presque jamais : de sorte qu’on a négliger de les cajoler agréablement parce que les occasions en étaient rares ». 

De même, vers 1650 , le futur abbé Arnauld, ayant assisté à une fête en Italie chez le duc de Parme raconte : « Toutes les femmes y étaient assises comme au sermon [chacune ayant sous les pieds un chauffoir] pour se garantir du froid qui était alors fort vif.. On était là dans un grand silence, occupés à écouter toutes sortes de musiciens et d’instruments, qui auraient assurément donné plus de plaisir à l’assemblée si l’honnête liberté des hommes avec les femmes y eut mêlé quelque conversation ».

David Hume (1711-1776) se promène  dans Paris et constate avec étonnement   qu’hommes et femmes se côtoient dans les rues, les ateliers et les salons. 

En effet, la France affectionne la société « mêlée » des salons qui inventent un « territoire commun aux hommes et aux femmes » (Mona Ozouf). 

« Dans ce commerce de l’esprit  qui valorise l’échange piquant et les sous-entendus, précise Emmanuelle Retaillaud, (Historienne, Tours) les deux sexes peuvent faire jeu égal. Cette culture salonnière donne aux  femmes privilégiées de l’époque une liberté et un pouvoir qui n’existent pas à ce degré dans d’autres pays. »[3]. 

 

La galanterie récupérée par le pouvoir

Ce succès ne laisse pas Louis XIV indifférent  La galanterie est un élément de la propagande royale, le « soft power de la monarchie » selon le mot de Claude Habib.    [4]

La première revue française financée par le trésor royal prendra le nom du messager des dieux, Mercure,  avec le qualificatif désormais à la mode : Le Mercure galant sera édité pendant un demi-siècle.

 

Galanterie Séduction en 7 épisodes

 

Episode 1:  http://midsky.canalblog.com/archives/2023/06/03/39929350.html

 

Episode 2 : http://midsky.canalblog.com/archives/2023/06/03/39929358.html

 

Episode 3 : http://midsky.canalblog.com/archives/2023/06/03/39929359.html

 

Episode 4: http://midsky.canalblog.com/archives/2023/06/03/39929361.html

 

Episode 5: http://midsky.canalblog.com/archives/2023/06/03/39929365.html

 

Episode 6: http://midsky.canalblog.com/archives/2023/06/03/39929367.html

 

Episode 7: http://midsky.canalblog.com/archives/2023/06/03/39929369.html

 

Texte complet :  https://www.canalblog.com/cf/my/?nav=blog.manage&bid=1628852&pid=39922133

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