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Eléments de conversation pour briller en société
21 janvier 2019

4 Marie Madeleine

4 Marie Madeleine

La femme au risque de l’Eglise

 

Les femmes n’ont pas à se féliciter du sort que leur réserve l’Eglise catholique. Elles y ont une position secondaire, comme celles des femmes juives et musulmanes, d’ailleurs.

Rappelons l’essentiel, qui conditionne des siècles de regard méprisants sur les femmes. 

 

Acte I.            Le paradis terrestre. Adam et Eve vivent paisiblement. Tout leur est permis, sauf de manger les fruits d’un certain arbre, l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Connaissance réservé à Dieu seul.

 Acte II.          Le serpent, rusé comme le diable qu’il est, dit à Eve que contrairement à ce qu’a dit le Maître, il n’y a rien à craindre à manger ces fruits. « La femme jugea que l’arbre était bon comme nourriture et attrayant à la vue et précieux pour l’intelligence ; elle cueillit de son fruit et en mangea, puis en donna à son époux et il mangea » (Genèse 3,6). Ainsi se constitua le péché originel.

Acte III         Dieu revient (mais où était-il parti, lui qui a le don d’être partout en même temps ? et (lui qui sait tout) demande où sont passées ses créatures : « L’éternel-Dieu appela l’homme et lui dit : « Où es-tu ? ». 

Adam avoue : ils se sont cachés parce qu’ils se sont rendus compte qu’ils étaient nus et avaient honte. Adam tente courageusement de se sauver en balançant Eve, tout en suggérant que la création de la femme n’était pas une bonne idée : « « La femme - que tu m’as associée - c’est elle qui m’a donné du fruit de l’arbre, et j’ai mangé » (Genèse 3,12). Quant à Eve elle répond que le serpent l’a entraînée.

Flagrant délit, comparution immédiate. Condamnations exécutoires : l’homme devra travailler pour manger, la femme accouchera dans la douleur. L’éternité étant réservée à la divinité, ils seront éloignés de l’arbre de Vie et connaîtront ainsi la vieillesse et la mort, le serpent rampera dans la poussière et sera haï de tous. Pas de sursis. 

Jan Gossaert, 1525

 

 Conséquences :

La femme, gouvernée par son désir est la source de tous les maux. 

L’homme est trop soucieux de plaire à la précédente.

Il convient de réduire la femme à n’être que la servante de l’homme et à obéir (elle doit se taire dans les réunions, écrivait Saint Paul).

Quant à l’homme, il faudra entraver ses relations avec ladite femme, et en particulier qu’il apprenne à contrôler son désir, car celui qui aime trop sa femme (légitime, bien sûr) est un fornicateur qui oublie ses devoirs chrétiens.

 C’est au Vème siècle que saint Augustin fit le lien entre le péché originel – qui est désir de connaissance- et la sexualité qui est désir charnel. Sous le beau nom de concupiscence –désir de jouir des plaisirs sensuels, des générations de confesseurs et de prédicateurs firent de l’acte sexuel un fruit quasiment défendu… dont la responsabilité, cela va sans dire, incombe principalement à la femme. 

 

 

Marie de Magdala   (appelée aussi Marie Madeleine, Madeleine, la Magdaléenne) 

 Marie Madeleine est une figure importante des Evangiles. 

Marie de Magdala (Magdala est un village près du lac de Tibériade) suit Jésus avec d’autres femmes dans son périple, assiste à la crucifixion. Mais surtout elle est celle qui, la première, constate que le tombeau, où le corps doit reposer, est vide et voit Jésus ressuscité.

Elle devient ainsi -une « simple » femme !-  la première des missionnaire, 

« l’apôtre des apôtres ».

 

LA rencontre 

Voyons cette scène avec l’aide de C.Pedotti (Jésus, l'homme qui préférait les femmes, Albin Michel, 2018)  qui signale le procédé romanesque dont use l’évangile de Jean. Le lecteur sait que Jésus se tient près de Madeleine mais celle-ci ne le sait pas. Elle pleure et demande à celui qu’elle croit être le jardinier où il a mis le corps. 

Le lecteur s’attend alors à ce que le Christ lui réponde en révélant son identité (dans la Bible, Joseph s’était révélé en disant : « C’est moi, Joseph, votre frère »), or le Christ répond par ce seul mot : « Marie ». 

Celle-ci s’s’exclame : « Rabbouni ! » qui est un diminutif affectueux pour « rabbin, maître » puis il ajoute, selon la traduction du texte latin (Noli me tangere) « Ne me touche pas » Mais on peut aussi lire (selon la traduction grecque : « Ne me retiens pas  ainsi - car je ne suis pas encore monté vers le Père ». 

Il s’agit plus d’une supplique que d’un ordre, dit C. Pedotti : « cette lecture n’a pas été retenue par la tradition ancienne. Quel Père de l’Eglise aurait pu penser qu’une femme puisse retenir Jésus et que la séparation d’avec celle-ci puisse être un déchirement ? ».

 

Madeleine va donc devenir la messagère du Christ, littéralement un apôtre avec cette mission de répandre la nouvelle de la résurrection, en particulier aux douze apôtres qui ont fui au moment de la crucifixion. 

Evidemment, personne ne la croit : les femmes sont les pires témoins qu’on puisse imaginer à cette époque :  elles ne peuvent colporter que des racontars ! 

 

Un personnage énigmatique

De Marie de Magdala on sait seulement que Jésus l’a délivrée de sept démons qui la tourmentaient ; mais la tradition concentre en elle deux personnages. Tout d’abord, la femme anonyme chez Simon. 

Puis, deuxième confusion, la femme de Béthanie qui verse du parfum sur la tête du Christ et rappelle ainsi le geste du premier personnage qui avait répandu du parfum sur les pieds du Christ. La confusion s’opère d’autant mieux que la femme de Béthanie est appelée Marie par l’évangile de Jean et que les évangiles de Marc et de Matthieu situent cet épisode dans la maison de Simon le lépreux, qui a le même nom que le pharisien Simon ! 

 

Une conséquence qui n’est pas innocente

La tradition catholique produira des centaines de tableaux montrant pour le plus grand plaisir des admirateurs une femme très belle et très dénudée aux pieds du Christ, et une Madeleine chez Simon le pharisien…  dont les textes ne mentionnent pas le nom!

 

Gregor Herhart 1520louvre-sainte-marie-madeleine_0

 

La confusion établie au VIIème siècle par le pape Grégoire le Grand a pour effet de dévaloriser cette femme, qui apporte à tous la Bonne Nouvelle et d’en faire une prostituée. 

 

Deux millénaires plus tard, en 2016, le pape François établit que la fête de Marie-Madeleine, le 22 juillet, doit être célébrée avec la même dignité que celle des apôtres : 

http://www.archivioradiovaticana.va/storico/2016/06/10/marie-madeleine_fera_désormais_lobjet_dune_fête_liturgique/fr-1236269

 

 

Pour plus de renseignements, 

lire « Un féministe chrétien au Ier siècle »

 

et voir l’interview de Christine Pedotti : Jésus, l’homme qui préférait les femmes,   

 

 

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