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Eléments de conversation pour briller en société
15 décembre 2020

Obama, le 4ème arbitre, le racisme, les médias.

 

PSG-Basaksehir-les-arbitres-roumains-accuseraient-Webo-de-racisme

 

President_Barack_Obama

Obama, le 4ème arbitre, le racisme, les médias.

 

Deux faits-divers et matière à réflexion.

 

 

 

 

Ce soir-là, à la 13e minute du match de Ligue des champions entre le PSG et Istanbul Basaksehir, un enraîneur du club turc, Pierre Webo, s’emporte sur le bord de la touche. Son attitude déplaît au quatrième arbitre, le Roumain Sebastian Coltescu, qui désigne à l’arbitre principal celui qu’il estime être le fauteur des troubles. 

Ne connaissant pas le nom de l’ancien joueur camerounais,  il le montre en disant qu’il s’agit du Noir. 

Le joueur Demba Ba intervient sur ce qu’il comprend à juste titre  comme une insulte : « Pourquoi il dit  négro  ? »  Voir la vidéo avec la traduction en français sur le site de l’Obs.

Le moment est un peu confus. Peut-être que l’arbitre principal a expliqué en anglais que le mot n’est pas une insulte en soi mais désigne une couleur de peau qui a permis de distinguer celui dont on voulait parler. 

Demba Ba interpelle alors l’arbitre n°4 : « En parlant d’un joueur blanc, tu dis 'ce gars' et pas 'le gars blanc'. Donc pourquoi tu dis ' le gars noir' pour parler d’un joueur noir ? »< 20minutes

Fin du match après que Demba Ba ait engagé les joueurs à quitter le terrain.

 

Changeons de situation, de personnages, et d’ambiance médiatique.

 

En novembre, Barack Obama fait paraître ses  mémoires, Une terre promise. Voici le passage concernant Nicolas Sarkozy : « Avec sa peau mate, ses traits expressifs, vaguement méditerranéens (son père était hongrois, son grand-père maternel juif grec), et de petite taille (il mesurait à peu près 1,66 mètre, mais portait des talonnettes pour se grandir), on aurait dit un personnage sorti d'un tableau de Toulouse-Lautrec. » Un peu plus loin, Obama évoque « ses mains en mouvement perpétuel, sa poitrine bombée comme celle d'un coq nain » et  sa « conversation [qui] passait de la flatterie à la fanfaronnade ». 

Le Point du 21/11/20 précise que l’original anglais ne s’embarrasse pas de parenthèses : « Il était moitié hongrois et un quart juif grec », écrit Obama.

Référer un individu à ses origines supposées et laisser entendre une conséquence sur son comportement, ses idées… c’est bien ce qui caractérise le racisme. 

La mention d’Henri de Toulouse-Lautrec demande un éclaircissement. Que suggère Obama ? Les tableaux de Toulouse-Lautrec ont souvent pour cadre des maisons closes avec avec leurs prostituées et leurs  clients.  Ou bien s’agit-il d’évoquer le physique du peintre (aux origines chrétienne et aristocratique) qui souffrait d’une maladie des os et mesurait 1,52m. Tout ceci manque d’élégance. Ce sont des commentaires à la Trump.

Nous y reviendrons.

 

En quoi ces deux événements nous interpellent-ils ?

Le premier fait suite à une très longue série d’insultes ouvertement proférées depuis de nombreuses années dans des stades divers par une foule haineuse à l’égard de joueurs noirs. Les réactions des fédérations de football, celles des pouvoirs publics restaient dérisoires. 

On comprend la joie de Lilian Thuram  qui célébrait dans l’Equipe  « Le moment historique qu’[il] attendai[t] ».

Qu’est-ce qui est essentiel : être Noir ou être Homme ?

 En roumain, « Noir » se dit « negru » qui désigne la couleur ( le mot roumain est issu du latin « niger  »= « noir ». Le fleuve Niger = le fleuve noir).

Le mot se prononce entre négro et négrou. Prononciation sur le site Forvo

 

Les mots noirjuif , asiatique ou arabe ne sont pas des insultes. C’est dans l’esprit du raciste, de l’antisémite qu’ils se chargent de connotations négatives. Faut-il se soumettre à la volonté de l’autre et s’interdire de les utiliser ? Faudra-t-il dire Black -comme c’est souvent le cas aujourd’hui- pour éviter Noir ?

Dans le cas qui nous occupe, l’injure n’est pas du même ordre que les propos ou les cris hurlés par la foule lors de certains matchs avec l’intention d’humilier les joueurs noirs. 
Comment désigner rapidement un homme noir dans une rangée d’hommes blancs ? Comment désigner un homme blanc dans une rangée d’hommes noirs ? lorsque la profession, le vêtement… ne le distinguent pas ?
Ceci étant dit, il est toujours plus judicieux (et le terme est faible) de dire : l’avocat noir, l’électricien noir, etc. 
Pour une raison, simple mais  clivante aujourd’hui. Le nom commun dit l’être, la substance, l’essence et l’adjectif dit une simple caractéristique, variable : « L'adjectif est un mot que l'on ajoute au nom pour exprimer les qualités, les diverses manières d'être des personnes ou des choses désignées par ce nom » < dictionnaire du CNRS
Dire le Noir, c’est désigner un individu par une de ces caractéristiques (comme grand, chauve, etc.) et en faire l’essentiel. 
Or l’essentiel, c’est l’humanité que chacun a en commun avec tous. Et non pas la couleur de sa peau, sa religion, ses idées politiques, ses goûts musicaux…
C’est ce sont qu’ont voulu montrer à juste raison tous les joueurs qui ce jour-là, ont quitté le stade. On peut regretter que ce mouvement n’ait pas eu lieu beaucoup plus tôt. 
B. Obama et l’esprit de la communauté
On partira de l’hypothèse qu’il n’est pas antisémite.
Mais il est américain, habitué à penser les individus en termes d’origine : on discute ainsi du vote latino en distinguant les électeurs d’origine cubaine, ceux qui viennent du Mexique… A New-York, Harlem, Little Italie, Little Odessa (le quartier russe), dessine une ethno-géographie  familière.
A tel point que personne ne s’est jamais inquiété de cette réplique cent fois répétée par un infirmier dans la série Urgences chaque fois qu’un patient arrivait en catastrophe à l’hôpital sur un brancard : « Homme (ou femme), Noir ( ou Blanc)… puis suivaient son âge et son type de blessure ou de maladie. Comme si l’origine était une dominante essentielle pour les soins qui allaient suivre. 

Les mémoires d’Obama n’ont pas soulevé de vagues indignées, ni aux Etats-Unis, ni en France. Et pourtant, les Américains viennent de créer une profession spécialisée pour traquer tout ce qui pourrait offusquer les minorités : «les « sensitivity readers », traduisez  relecteurs de sensibilité , comprenez  chasseurs de polémiques  [chargés en fait d’éviter les procès] qui ont pour mission, dans les maisons d'éditions américaines, de vérifier si un personnage ou des propos n'apparaissent pas comme racistes, homophobes ou misogynes. 

Clairement, Barack Obama est passé entre les gouttes, aux États-Unis comme en France ».<Le Point

 

 L’attitude de certains médias français

France-Inter sur son site  propose une version propre, revisitée, qui évite ce qui peut blesser :   « Sarkozy était tout en emportements émotifs et en propos hyperboliques. Avec sa peau mate, ses traits expressifs, vaguement méditerranéens, et de petite taille (il mesurait à peu près 1,66 mètre, mais portait des talonnettes pour se grandir, on aurait dit un personnage sorti d'un tableau de Toulouse-Lautrec) »

 Belle version expurgée sans que soit mentionnée les coupures opérées. On pourrait s’en étonner.

 Même délicatesse dans Le Monde

   « [Obama] juge ses traits  « vaguement méditerranéens » et il assassine le « torse bombé  de petit coq ». < Le Monde du 23/11/20.    

  

Joli travail de journaliste, en sept mots soigneusement choisis, pour ne pas heurter les lecteurs. On pourrait  s’étonner de cette modération qui masque une réalité qui demande explication .

Mais…

… merci à François Morel qui remet les pendules à l’heure dans son billet du 11 décembre <France-Inter, 

 

 

Il y a visiblement des informations qui font du bruit et d'autres qui peinent à se faire entendre.

 

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Commentaires
M
La LDH semble apte à beaucoup de choses qui ne concerne pas les droits de l'Homme
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M
Après la plante déposée par la Ligue des Droits de l’Homme contre une universitaire prof de droit, il semblerait que la LDH soit apte à établir un lexique.
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J
Il y a, semble-t-il, des mots interdits aux Blancs...
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