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Eléments de conversation pour briller en société
3 janvier 2019

52 semaines pour les femmes

                                         52 semaines pour les femmes 

 

 

(3)                                Théroigne de Méricourt

Portrait de J

 

 

 

« Tant que les femmes ne s’en mêlent pas, il n’y a pas de véritable révolution » Mirabeau

 

 La légende accompagne Théroigne tout au long d’une vie d’espérances, de combats, d’emprisonnements. Tour à tour « Amazone rouge », « catin à 100 sous », « charogne ambulante » pour la presse royaliste, admirée ou humiliée, femme de convictions, réclamant le droit à la parole politique pour les femmes et femme d’action, sabre au poing, réclamant la création de légions féminines entraînées au combat.

 

 Elle est née en 1762 à Marcourt, dans la région de Liège et porte le nom d’Anne-Joseph Terwagne (ou Théroigne). Elle a cinq ans à la mort de sa mère ; son père la confie à des tantes puis à un couvent. Elle s’enfuit après le remariage de son père, garde les vaches, mais à 17 ans devient miraculeusement la dame de compagnie d’une Anglaise qui l’avait remarquée. Elle pourra alors bénéficier pendant quatre années de l’éducation qui lui manquait. 

 De retour à Paris, elle devient la maîtresse d’un marquis qui l’entretient –c’est le destin de nombreuses jeunes filles seules et pauvres-. Episode qui lui permettra de mener pendant un temps une vie aisée.

 Dès le début de la période révolutionnaire, elle s’installe - comme Olympe de Gouges - à Versailles pour assister aux débats de l’Assemblée Nationale. 

 Le 14 juillet, elle aurait participé à la prise de la Bastille, vêtue en amazone, (longue jupe, veste ajustée, et large

l'Amazonechapeau à la mousquetaire), armée d’un sabre et de pistolets. En octobre, elle aurait 

Theroigne de Mericourt

participé à la marche des femmes sur Versailles qui ramènent de force à Paris la famille royale. Vraie ou fausse, les royalistes comme les Montagnards lui feront une réputation de pasionaria fougueuse. 

 Les royalistes font de "Théroigne" un prénom et lui accolent le nom approximatif de son lieu de naissance, lui donnant par dérision peut-être, un patronyme vaguement aristocratique … et dangereux à cette époque.

 Elle suit l’Assemblée à Paris et ouvre un salon où se rencontrent entre autres Camille Desmoulins et le chef des Girondins Jacques Brissot.

 

Elle fonde en 1790 avec le mathématicien Gilbert Romme la « Société des Amis de la loi » qui demande et obtient l’abrogation de la loi sur le marc d’argent qui exigeait de posséder cette somme importante pour être élu à l’Assemblée Constituante. La Société demandera l’égalité pour les juifs, les musulmans et « les hommes de toutes les sectes [ =religions] ».

 En février 1791, lors d’un voyage en Belgique, elle est enlevée, emprisonnée à Vienne et interrogée pour qu’elle avoue son projet d’assassiner Marie-Antoinette. Elle sera libérée à la fin de l’année et accueillie triomphalement à Paris. 

 Le 10 août 1792, elle participe à la prise des Tuileries où réside Louis XVI et recevra pour son courage, ainsi que deux autres femmes, la « couronne civique ». Ce même jour, elle aurait agressé et tué –ou incité la foule au lynchage- un journaliste royaliste qui l’insultait de longue date dans les colonnes de son journal. 

 

Bien qu’elle reste en vérité modérée, dans la mouvance des Girondins, elle sera désormais vue comme une furie sanguinaire exposée à la haine des royalistes et à la méfiance des Jacobins. 

 La légende lui survivra : Baudelaire l’évoquera, dans les escaliers des Tuileries montant à l’assaut de la monarchie.

 « Avez-vous vu Théroigne, amante du carnage,

Excitant à l’assaut un peuple sans souliers,

La joue et l’œil en feu, jouant son personnage,
Et montant, sabre au poing, les royaux escaliers ? 

 

Sisina)

 Le 15 mai 1793 se situe l’événement qui change la destinée de Théroigne. Les révolutions de Paris du 18 mai le présente ainsi : « Depuis plusieurs jours, un certain nombre de femmes font la police dans le jardin des Tuileries et dans les corridors de la Convention nationale […] Elles arrêtent les gens qui leur paraissent suspects. Ce sont elles qui mercredi 15 donnèrent le fouet à Théroigne en l’appelant Brissotine [= Girondine] ». 

 Il y avait de la part de ces femmes appartenant au groupe des « républicaines-révolutionnaires », qui dénudèrent publiquement Théroigne une volonté de l’humilier. A tel point que Marat –qui n’était pas un tendre- dut intervenir, dit-on,  pour faire cesser le lynchage. 

Théroigne_de_Méricourt_-_1816

 Sa raison vacille. Elle mourra après 23 ans d’internement dans la section psychiatrique de La Salpétrière en 1817. On débat encore pour dégager les causes de sa folie due à un état psychologique mélancolique ou conclusion de la syphilis qui la ronge depuis le début de ses années parisiennes, 

 

 

 Ecouter

L’hommage de Sarah Bernhardt : Le rêve de Théroigne de Méricourt : https://www.youtube.com/watch?v=K9j_fE4RphI

 

 Rappel historique

 Les principaux acteurs de la Révolution

Les Girondins, à l’origine, regroupent principalement des députés originaires de la Gironde. Ils sont considérés comme modérés et, opposés à la toute-puissance parisienne, seront accusés de « fédéralisme ».

La journée du 10 août 1792 qui voit la prise des Tuileries par une foule d’émeutiers organisée par la Commune insurrectionnelle de Paris,  l’emprisonnement de la famille royale suivie par les « massacres de septembre » au cours desquels sont assassinés  des centaines de prisonniers éloignent les Girondins, majoritaires, des Montagnards de Robespierre. Ils ne tarderont pas à paraître suspects aux plus révolutionnaires. En juin 93, la Convention, envahie par les émeutiers, livrera les députés girondins qui seront exécutés.

Les Montagnards -Danton, Marat, Robespierre…- sont assis, à gauche de l’Assemblée, sur les gradins les plus élevés.

Ils ont le soutien de la Commune qui les aident à éliminer les Girondins et à mettre en place un gouvernement implacable, autoritaire et centralisé : la Terreur est « mise à l’ordre du jour » (17 000 exécutions, 500 000 incarcérations) et perdurera du 10 août 92 à la chute de Robespierre en juillet 1794. 

 

(source : J. Tulard …, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, ed. Robert Laffont )

 

 

 

(2)      Olympe de Gouges

 Les révolutions ne sont pas tendres avec les femmes.

 

« La moitié du genre humain », comme l’écrivait Condorcet en 1787, reste à la place que lui désigne une tradition que les révolutionnaires ne remettent pas en question … sauf quand il s’agit de rallier des citoyens- même femmes- pour faire nombre, acclamer, huer, grossir une émeute… La victoire acquise, la femme doit à nouveau obéissance et soumission.

 

 

Marie-Olympe-de-Gouges

Olympe de Gouges est née en 1748 à Montauban des amours de sa mère et du marquis Le Franc de Pompignan, farouchement anti-voltairien. On ne lui donne pas d’éducation et elle est fiancée à 16 ans à un vieillard de soixante ans qui a la délicatesse de mourir rapidement. Un garçon était né de cette belle union, dont elle s’occupera constamment et qui la reniera quand elle montera sur l’échafaud.

 

De son veuvage, elle tire outre une certaine aisance financière, une vie libre et joyeuse, la détermination de rester célibataire et une pièce de théâtre, La Nécessité du divorce

 

 En 1785, elle tente de faire jouer une pièce étonnamment moderne où elle condamne le racisme et le colonialisme qui sévissent dans les Antilles. En 1788, elle publie une Lettre au peupleoù elle souligne l’extrême pauvreté des uns et l’arrogante richesse des autres et promet pour bientôt la révolte des misérables. C’était en décembre, huit mois avant la prise de la Bastille.

 

Jamais à court d’idées généreuses, elle imagine l’ISF qu’elle nomme « impôt sur le luxe effréné », demande l’ouverture de maternités, exige une aide pour les chômeurs,  la participation des femmes à la vie citoyenne, propose une réforme de la justice… Mirabeau dira d’elle qu’elle a « des fusées dans la tête ».

 

Le 28 octobre 1791, elle dépose à l‘Assemblée une proposition, la « Déclaration des droits de la femme et de la Citoyenne » qui établit une égalité stricte entre hommes et femmes. « La femme a le droit de monter à l’échafaud, dit-elle, elle doit avoir le droit de monter à la tribune ».  La proposition est dédaignée par les députés qui deux ans plus tard accuseront les femmes de fomenter des émeutes sur la voie publique et interdiront les sociétés révolutionnaires féminines qui s’étaient créées. 

 Olympe est farouchement opposée à la violence et à la peine de mort : « Le sang, même des coupables, versé avec profusion et cruauté, souille éternellement les révolutions ». Elle appartient au groupe des Girondins, opposé aux Montagnards de Robespierre, qu’ils soupçonnent de vouloir exercer un pouvoir sans limite. Olympe ne prend pas de précautions, fait afficher dans Paris un texte où elle accuse Robespierre de vouloir se « frayer un chemin sur des monceaux de morts » et  en appelle au peuple pour arrêter sa folie homicide...

 

Son dernier affichage lui sera fatal. Il s’agit d’une réflexion sur la forme du gouvernement : elle propose que dans chaque département les électeurs, hommes et femmes, votent sur le choix d’un gouvernement fédéral ou centralisé. Elle est dénoncée et emprisonnée sans délai.

 On l’accuse de s’opposer à la « République une et indivisible », gouvernée depuis Paris et de défendre la diversité des provinces qui mènerait à la guerre civile. 

 Ses amis Girondins sont exécutés. 

 Elle subit le même sort, bien qu’elle soit enceinte, le 3 novembre 1793.

 

 

 

 

   (1)           1971 : Le Manifeste des 343 "salopes"

343

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le 5 avril 1971, le Nouvel Observateur publie un manifeste en faveur de l’avortement, signé par 343 femmes dont de nombreuses célébrités.

Le manifeste commence ainsi :

 « Un million de femmes se font avorter chaque année en France.

Elles le font dans des conditions dangereuses en raison de la clandestinité à laquelle elles sont condamnées, alors que cette opération, pratiquée sous contrôle médical, est des plus simples.
On fait le silence sur ces millions de femmes.


Je déclare que je suis l’une d’elles. Je déclare avoir avorté…»

 

CharlieHebdo1971_343Salopes

Ces femmes qui viennent de s’engager publiquement risquent des peines d’emprisonnement.

 La semaine suivante une caricature en couverture de Charlie-Hebdo titre « Qui a engrossé les 343 salopes ? et le premier ministre de l’époque, Michel Debré, répond : « C’était pour la France »

Le terme est resté ...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En 1972, a lieu le procès de Bobigny: Marie-Claire, 17 ans, a été violée par un de ses camarades. Lorsqu’elle découvre sa grossesse, elle demande l’aide de sa mère qui contacte une « faiseuse d’anges » qui procède à l’avortement. 

Marie-Claire est dénoncée par son violeur, impliqué dans un vol et qui espère alléger sa peine.

 

Marie-Claire et les personnes incriminées sont défendues par maître Gisèle Halimi, grande figure de la lutte pour le droit des femmes. 

La jeune fille est acquittée, les autres protagonistes ont des peines avec sursis. 

 

Le retentissement du manifeste et du  procès sont tels que le ministère de la Justice demandera la suspension des poursuites dans ce genre d’affaires.

 Et le 17 janvier 1975, la loi sur l’interruption volontaire de grossesse -dite Loi Veil- sera votée après des débats houleux.

 

Mais le cours de l’Histoire suit rarement un cours ascendant.

 Les opposants à l’IVG sont actifs. Des manifestations ont eu lieu, devant des cliniques ou des hôpitaux pratiquant l’IVG, visant à culpabiliser les femmes et les gynécologues. 

 

Dans certaines régions, les médecins mettent en avant la clause de conscience. C’est le cas de la Sarthe où 3 spécialistes sur 4 refusent d’intervenir.

 

Le pape François le 10 octobre 2018 a comparé l’avortement au « recours à un tueur ».

 


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