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Eléments de conversation pour briller en société
20 octobre 2020

5 (1). Fake news, faits alternatifs, réalité, vérité et mensonges… Un coup de shaker. Servir à volonté. No limits.

 

 

 

 

Donald 750 x394

5 (1).  Bricolo-politico

Petit manuel pour débutant en politique 

Fake news, faits alternatifs, réalité, vérité et mensonges…

Un coup de shaker. Servir à volonté.

No limits.

 

Rappel des articles 1 à 4

 Episode 1: Faire simple

Episode 2: Epurer puis rassembler

Episode 3: Affichez-vous!

Episode 4: Parler, parler, parler

 

La recherche de la vérité n’est sans doute pas le stage de formation le plus suivi par les acteurs de la vie publique qui préfèrent la manipulation des idées et des émotions. 

Ils suivent en cela Talleyrand, qui après avoir servi Louis XVI, la Révolution, Napoléon Ier puis Louis XVIII, savait de quoi il parlait : « La parole a été donnée à l’homme pour dissimuler sa pensée » 

 

1 Le temps du soupçon.  

 

On sait, depuis Descartes, que le doute est une étape de la connaissance. Encore faut-il qu’il ne se transforme pas en soupçon fondé « sur des indices discutables » nés d’a priori sans fondements. 

C’est pourtant bien ce que ressentent aujourd’hui nombre de nos contemporains. Mais ce moment de l’incertitude est souvent  rapidement submergé par la conviction que « la vérité est ailleurs » (< CAIRN).  

 

Les causes de ce soupçon généralisé sont multiples. 

Trop d’informations – l’infobésité- créent un bruit de fond continu qui brouille les faits.  Umberto Eco disait : « Aujourd’hui, la presse transforme la moindre déclaration en un fait établi » (<L'Humanité)

L’information est complexe. Le citoyen cherche des certitudes ( Voir à ce propos l’article 1 : Faire simple). Or, la tendance de certains journalistes est de résumer un argument en une courte phrase, une longue réponse doit devenir un monosyllabe -oui /non. Les nuances passent mal dans les grandes émissions TV. 

 

L’information est fabriquée

L’information est, par son origine, l’action de mettre en forme. Il suffit des premières minutes du premier jour du  premier cours de journalisme pour saisir que l’information propose un choix d’événements et modèle une vision du monde. Tout comme la photographie qui choisit un cadre en ignorant une partie de la réalité.

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Florence Aubenas dans La Fabrication de l’information (1999) montre des journalistes qui ne résistent pas au plaisir de choisir selon leurs propres critères l’individu qu’ils vont interroger et montrer à la télévision comme le porte-parole d’une communauté ou d’un mouvement. Le « Tarzan grande gueule » illustre les clichés du journaliste et ravit le spectateur qui n’est pas déconcerté par le manifestant, le boutiquier, le policier qui ressembent exactement à ce qu’on attend d’eux.

 Propriétés de groupes de presse, les supports de l’information traditionnelle (presse écrite, radio, T.V.) sont supposés soumis aux lois de la finance, liés aux ressources publicitaires, et en définitive au pouvoir, quel qu’il soit.

 Mais surtout, l’individu du XXIème siècle est soucieux de sa liberté, de son autonomie intellectuelle. Il est persuadé que son opinion est bien la sienne propre et non pas le fruit de l’éducation, du milieu social, d’une idéologie qu’il a infusé doucement au contact de ses pairs.  (Voir les articles sur  L’individu 

  Il s’autorise donc à se faire une opinion sans l’aide des institutions qu’il n’estime pas légitimes puisque le savoir est à portée de main, à condition de vouloir le chercher. Chacun a son ressenti qui n’a pas besoin d’être avalisé par « ceux qui savent ».

 

2 Le soupçon en actes. 

La connaissance est à portée de la main

Les élites, outre qu’elles sont soupçonnées d’être loin de la réalité quotidienne, soumises au pouvoir de l’argent, sont également intellectuellement dévalorisées : le savoir ne s’apprend pas ! Ainsi, Jean-Marie Bigard a une opinion, aussi valable que celle du ministre de la Santé, Olivier Véran, ou des membres  du Conseil scientifique.

Les media nous ont habitués depuis des décennies a interroger le témoin lambda qui a assisté de près ou de loin à un événement, dont il ne pouvait comprendre ni les causes, ni les conséquences. C’est une part importante des micros-trottoirs, chargés de collecter l’émotion.  Renan Laruequi enseigne la littérature française et les « études véganes » en Californie s’interroge sur la légitimité de la connaissance : « Quelle raison pourrait-il bien y avoir à attribuer des droits en fonction des capacités à raisonner plutôt que celle de ressentir ? » 

 Et ainsi, après une explosion,  le témoin-qui-a-eu-peur devient sur nos écrans le représentant de la multitude avec qui il partage la même émotion. 

Les Temps modernes  de novembre 2016 se pose la question de savoir si Nuit debout a été un échec ou une victoire. Le Nouvel Obs rend hommage à la méthode suivie : « au lieu de se contenter de solliciter les chercheurs reconnus ès -«révoltes politiques», l’équipe des «Temps modernes» a lancé un appel à contributions sur les réseaux sociaux, ce qui lui permet de rassembler dans ce numéro des textes d’étudiants ou de militants.» (<Nouvel Obs)

Le témoin principal reconnaît qu’il n’a pas de « compétence particulière susceptible d’aider le lecteur à éclairer Nuit debout en particulier . Je ne suis ni sociologue, ni historien, ni politiste, je ne suis même pas spécialisé en philosophie politique. Pire : je n’ai pas de longue et profonde expérience militante qui me donnerait sur la situation présente une perspective en prise sur le réel de la politique […]  Mais cette méconnaissance revendiquée permet une plus grande liberté, puisqu’il ne peut ,par les  connaissances qu'il n'a pas, , déformer ce qu’il voyait : « Je me suis senti en effet d’autant moins tenté de plaquer sur ce dans quoi je me suis engagé une grille d’analyse élaborée ailleurs que j’en étais plus largement dépourvu. (<Cairn)

 Umberto Eco a un avis tranché sur ce genre de commentaire: « Les réseaux sociaux ont donné le droit à la parole à des légions d'imbéciles qui avant ne parlaient qu'au bar et ne causaient aucun tort à la collectivité. On les faisait taire tout de suite. Aujourd'hui ils ont le même droit de parole qu'un prix Nobel ». 

 En définitive, le temps du soupçon  se traduit par un refus immédiat et définitif de toute information en provenance des institutions de pouvoir représentés par les hommes politiques, les journalistes,  les scientifiques, les enseignants… 

 

rue 89

Plus on like, plus c’est vrai 

Il ne reste plus pour une part de la population que les réseaux sociaux pour donner des faits vrais et des commentaires judicieux. Eux seuls sont supposés détachés de toute idéologie qui les guiderait dans le choix et la mise en forme des informations.

 Désormais, la vérité ne se mesure plus à la justesse d’un raisonnement, ni à l’accord avec la réalité ( voir plus loin Les faits alternatifs). Le seul critère de la vérité est devenu la viralité, selon le mot de Kamel Daoud. 

Est vrai ce qui est accepté par le grand nombre.

A venir:  5(2) Mensonges et fake news

 

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