37 Lingerie fine et féminisme

En 2015, Karlie Kloss, l’un des mannequins vedettes de la lingerie féminine quitte Victoria’s secret. Elle s’explique dans Elle sur ses motivations féministes

En 2017, Adriana Lima, autre star de la marque a les mêmes sentiments et prend la même décision: « J'ai réalisé que la majorité des femmes se réveillent probablement tous les matins en essayant d'entrer dans les stéréotypes que la société, les réseaux sociaux, la mode etc. leur imposent. Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans un monde avec des valeurs aussi superficielles. Ce n'est pas sain physiquement comme mentalement. J'ai donc décidé de faire en sorte que cela change ».

L’entreprise sexy-glamour qui refusait tout changement s’en tenait à son objectif originel de mise en scène d’un fantasme. Mais

en 2019 elle renonçait à son fameux défilé télévisé, qui au fil des années avait perdu six millions de téléspectateurs américains.

Les causes de cette désaffection sont nombreuses et touchent toutes les marques qui veulent à la fois garder leur clientèle et séduire les 18-24 ans qui achètent de la lingerie huit fois par an (selon une étude Unique by Mode City de 2018)

Cette nouvelle clientèle est sensible à l’engagement éthique et social.

Le refus de la femme objet

Au Bon Marché, le magasin sélect de la rive gauche, la directrice du département lingerie assure que les femmes ne veulent plus de la communication traditionnelle fondée sur l’exhibition de la sensualité féminine à destination des hommes. (< Le monde 3 nov 17)

Les hommes désertent -sous la pression de leur compagnes ?-« Depuis quelques années, les visiteurs masculins en quête d'un cadeau sensuel se font rares et, sur les catalogues maison, les mannequins n'apparaissent qu'habillés. (<L’Obs. janv 19)

En 2017, Lejaby propose des portraits de femmes en plan rapproché. « L’idée était de montrer le visage plus que le corps, de mettre en avant le caractère. On avait envie d’une femme séduisante avant tout pour elle-même », explique la responsable de l’image .

De même, chez Simone Pérèle, on pratique l’allusion : une bretelle rouge sur une épaule dénudée ou un brin de dentelle noire

dépassant d'un chemisier entrouvert ne laissent aucun doute. Pas la peine de zoomer sur une paire de fesses.

« L’image de la femme-objet, très maquillée, avec talons aiguilles et porte-jarretelles, a fait son temps, mais c’est cyclique. Dans les années 1970, les femmes brûlaient leur soutien-gorge pour s’émanciper ; dans les années 1980, on valorisait les corps athlétiques, puis la vague du porno chic des années 1990 a mis en avant une hypersexualisation des corps. » (<Daniela Melo, styliste, Le Monde 14 juin 2019)

Etam, le leader du secteur en France (11% du marché), vend plus de brassières inspirées du sport, plus de triangles sans armatures et moins de soutiens-gorge coques qu'il y a cinq ans.

Refus du harcèlement de rue

« [La Mairie de Paris] a beaucoup travaillé sur le sujet du harcèlement de rue dès 2014. Systématiquement, ce qui revenait, c'était le paradoxe entre le fait de dire que les femmes ne sont pas des objets dont les hommes peuvent disposer dans l'espace public, tout en ayant en toile de fond ces publicités de femmes hypersexualisées. »

En décembre 2018, l’élue parisienne chargée de l’égalité hommes-femmes demande le retrait d’une affiche apposée sur la façade des Galeries Lafayette.

Refus des agressions sexuelles

Une semaine après les premières révélations du New York Times sur le producteur de cinéma Harvey Weinstein, le mannequin américain Cameron Russell partageait avec ses 106 000 abonnés Instagram le message d’une consœur lui racontant comment un photographe avait abusé d’elle à ses débuts – elle avait 15 ans – sous prétexte que ça rendrait les images « plus sensuelles ».

Depuis, la page de cette trentenaire connue pour son engagement démocrate est accaparée par des dizaines de témoignages anonymes sur le harcèlement sexuel. Ailleurs sur les réseaux sociaux, d’innombrables victimes s’expriment à visage découvert sous le hashtag qu’elle a créé : #MyJobShouldNotIncludeAbuse (« la maltraitance ne fait pas partie du métier »).

Un grand nombre de victimes sont des hommes. Moins connus, moins payés, plus précaires, les violences sont rarement dénoncées.

Refus de LA beauté formatée : le body positive et la diversité

La beauté ne fait plus rêver… les femmes qui revendiquent la fierté de leur propre corps sans référence aux mannequins calibrés, dupliqués à l’infini. Taillés au millimètre, celles-ci sont désormais d’une autre planète. Des morphologies diverses, moins régulées par les canons des couturiers permettent aux femmes de se reconnaître dans un modèle personnel.

Chantelle avait pris le virage avec Theya Elam - métisse, taches de rousseur, mensurations plus en accord avec celle d’une vraie femme-. (Sur les mensurations comparées des mannequins et des Françaises, on peut feuilleter ce site )

Rihanna, parfois critiquée pour ses rondeurs, a imposé à la Fashion week 2019 de New-York de nouveaux standards de beauté avec son label de lingerie Savage x Fenty

Sur les réseaux, le mouvement Body Positive prend de l'ampleur. Trop grosses, trop maigres, trop plates, trop blanches… Les filles refusent en bloc les normes et affichent leurs corps avec vergetures, cellulite et taches de grossesse. Les 18-24 ans, premiers acheteurs de sous-vêtements, sont avides de transparence, d'authenticité (l’Obs 5 janvier 2020 )

Love Disfigure et Nünude, deux marques de sous-vêtements inclusifs, ont mené une opération conjointe devant la boutique

Victoria’s Secret de Londres. Sept femmes d’âge, de morphologie et de couleurs de peau différentes posaient dans la rue, vêtues de dessous couleur chair, pour promouvoir la diversité dans le milieu de la mode. (<L’obs, 26 novembre 2019).

En septembre dernier, son défilé réunissait toutes les morphologies et toutes les couleurs de peau, dont le mannequin Slick Woods, alors enceinte de neuf mois, qui a accouché dès la fin du défilé (< Le Soir )

Victoria’s secret se lance…

Valantina Sampaio est en août 2019, le premier mannequin transgenre à rejoindre le label. (< Paris-Match )

La tendance est bien à la diversité et le mot « mannequin » nom obstinément masculin est devenu un terme neutre. Entre temps, le féminin n'est pas apparu.

... et puique les femmes ouvrent la voie du confort et du réalisme, suivons-les:

Fini !

Notre nouveau body !

A voir:

40 dossiers sur le body positive dans Cosmopolitan

https://www.cosmopolitan.fr/le-body-positivisme-pour-etre-fier-de-son-corps,2022779.asp

37 Lingerie fine et féminisme

Partager cet article